Salut tout le monde 👋
Ces dernières années, notre manière de consommer la banque a totalement changé ! Il est possible de gérer tous ses comptes bancaires dans une même app, et même d’initier des virements sans passer directement par sa banque.
Tout cela est possible grâce à l’Open Banking !
Pour parler de tout ça, j’ai eu le plaisir de recevoir Olivier Binet, le CEO de Bridge, une solution que vous avez certainement déjà utilisée sans même vous en rendre compte.
Au programme de notre échange :
Bridge & ses enjeux 🚀
Open Banking & Open Finance 🏦
La DSP3 🇪🇺
Les licornes 🦄
⏱️ Temps de lecture : 5 minutes
Salut Olivier, est-ce que pour commencer tu pourrais te présenter et nous parler de ton parcours ?
Salut Thomas, bien sûr ! J'ai fait mes études aux États-Unis, et j'ai commencé à travailler dans le secteur de la tech assez rapidement, en 1999. Par la suite, j'ai été amené à revenir à Paris, j’ai travaillé dans le conseil et j'ai rejoint TF1 sur la partie e-commerce, notamment via l'émission de télé-shopping, ce qui était vraiment une super expérience.
Ensuite, j'ai décidé de poursuivre mes études et j’ai obtenu un MBA. Mon objectif était de rester dans cet univers à la croisée des chemins entre le business, la tech et l'innovation. J'ai ensuite travaillé chez PayPal, ce qui a été une expérience extraordinaire. Le commerce mobile n’existait pas encore, Facebook n’avait pas encore de business model. C’était un autre univers !
J'ai ensuite rejoint une entreprise polonaise, InPost, qui propose des casiers automatisés pour la livraison de colis. J'ai été chargé de lancer leurs activités en France. Plus tard, lorsque l'entreprise a été rachetée, j'ai continué à travailler avec eux à Londres.
Après ça, retour en France pour me lancer dans une nouvelle aventure dans les FinTechs. J'ai rejoint une néo-banque B2B hollandaise et j'ai développé leurs activités en France pendant deux ans.
Depuis 9 mois, je suis chez Bridge. J'ai rejoint l'équipe après la levée de fonds pour contribuer à la croissance de l'entreprise et à son expansion sur d'autres marchés. Le secteur de l'Open Banking est en pleine effervescence. C'est un domaine passionnant et en constante évolution, qui contribue à de nombreuses opportunités dans le secteur financier en général, et dans l'Open Finance en particulier.
Il y a une tendance à déporter toutes les fonctionnalités bancaires en dehors de la banque, pour les intégrer directement dans les cas d'usage.
Du coup, que faites-vous chez Bridge ?
Chez Bridge, nous sommes le pionnier européen de l'Open Banking. Nous avons deux activités principales.
La première concerne les connecteurs bancaires, qui permettent à des acteurs tiers d'accéder aux données bancaires. Un exemple concret est l'intégration des relevés bancaires dans les logiciels de gestion. Bridge est un pionnier dans le domaine de l'Open Banking et contribue à révolutionner ce secteur. Auparavant, les comptables devaient demander les relevés bancaires chaque mois, mais aujourd'hui, les logiciels automatisent ce processus en nettoyant et catégorisant les données pour apporter plus de valeur à leurs clients.
Plus récemment, nous avons développé une autre activité liée aux paiements, appelée l'initiation de virement. Cela permet d'initier un virement bancaire à partir d'une application. Les usages sont nombreux, mais je peux en citer deux :
Le premier concerne le secteur du commerce, offrant une nouvelle méthode de paiement aussi efficace que la carte de crédit mais avec un avantage significatif en termes de coûts. La hausse des prix des cartes de Visa et Mastercard a d'ailleurs été critiquée ces derniers mois. Notre solution répond à cette problématique.
Ensuite, il y a la question des plafonds imposés par les cartes, qui peuvent poser problème pour certains modèles commerciaux en ligne, particulièrement les transactions de montant important, comme l'achat de voitures. Notre solution permet également une réconciliation immédiate entre le paiement et la commande.
Mais ce n'est pas tout, car cela s'applique également à d'autres choses comme la facturation électronique. En France, la facturation électronique arrive, et de nombreux logiciels de gestion intègrent d’ores et déjà l’Open Banking à leurs solutions. Lorsque vous transmettez des éléments de facture à l'État, il est nécessaire d'indiquer le statut du paiement et la plupart de ces plateformes de facturation électronique intègrent également des solutions de paiement, généralement par virement. C'est là que Bridge intervient en permettant d'initier ce virement directement depuis le logiciel de gestion, offrant ainsi une expérience aussi fluide que celle des cartes de crédit, ce à quoi les gens sont habitués lorsqu'ils effectuent des paiements en ligne.
Il y a un terme qui revient souvent en ce moment, c’est Open Banking. Open Finance, même, de manière plus générale. Peux-tu nous expliquer ce que c'est, et en quoi c'est en train de révolutionner la finance ?
Alors, si on remonte encore un niveau au-dessus, c'est même l'Open Data à la base. C'est vraiment l'ouverture de l'accès à certaines données qui, en théorie, permettrait de stimuler l'innovation.
Les données étaient verrouillées dans un coffre-fort. Personne ne pouvait en tirer profit, sauf les banques, et elles avaient du mal à créer des innovations. L'ouverture de ces données a permis à toute une industrie de se réinventer, en particulier le secteur de la comptabilité et de la gestion, qui a pu enrichir sa donnée financière et s'améliorer. On peut également mentionner le secteur du crédit, qui est de plus en plus basé sur l’Open Banking. Vous n'avez plus besoin de télécharger vos relevés bancaires pour les envoyer à l'institution de crédit. Vous liez simplement votre compte bancaire à la demande de crédit, l'organisme qui envisage de vous prêter de l'argent analyse les données et vous donne une réponse en quelques secondes.
Il s'agit donc de métiers anciens qui se réinventent et se numérisent grâce à l'accès à ces données. C’est ça, initialement, l'Open Banking.
Maintenant, la manière de consommer les services bancaires a évolué. Comment consomme-t-on, aujourd'hui, les services bancaires ? Nous nous sommes rendu compte que, grâce aux API, les services bancaires sont de plus en plus intégrés dans des outils métiers. Vous n'avez plus envie d'aller à la banque pour retirer de l'argent ou effectuer des opérations. Vous êtes en train d'acheter quelque chose, de payer une facture, et vous voulez effectuer ces transactions de manière fluide et simple, directement à partir de l'application que vous utilisez. Il y a donc une tendance à déporter toutes les fonctionnalités bancaires en dehors de la banque, pour les intégrer directement dans les cas d'usage que vous souhaitez. C'est là où va l'industrie. Tout a commencé par les données, suivi des paiements, et ensuite, toutes les autres fonctionnalités bancaires. Les prochaines étapes concernent le secteur financier, notamment le crédit, par exemple.
En ce qui concerne l'Open Finance, il n'est pas encore clairement défini, et nous ne savons pas encore exactement ce qu'il englobera. Nous verrons bien. J'espère que de nombreuses entreprises innovantes vont émerger dans le secteur financier et transformer la banque grâce à ce mouvement. L'essentiel, c'est qu'il s'agit d'une manière différente de consommer les services bancaires, en les intégrant directement dans les cas d'usage via des API.
C’est très intéressant cette expression, “consommation différente de la banque” ! Tu parlais tout à l’heure de la DSP3, qu’est-ce-que cela va apporter à Bridge ?
Les différentes directives sur les services de paiement (DSP) successives ont défini les possibilités pour des acteurs comme nous d'exister, en leur fournissant un cadre réglementaire clair tout en assurant la sécurité des utilisateurs. Chaque étape a permis aux acteurs métiers de progresser. La DSP2, par exemple, nous a permis d'accéder aux données des comptes bancaires, d'en extraire des informations, et d'initier des transactions. C'était un progrès significatif, mais il y avait encore des lacunes à combler.
L'une de ces lacunes concerne la performance, notamment en ce qui concerne les paiements. Toutes les banques sont tenues de fournir un accès aux données et la possibilité d'initier des paiements à tous les acteurs disposant d'une licence pour le faire, comme nous. Cependant, la façon dont elles le font et leur niveau de performance sont laissés à l'appréciation de chaque banque. Certaines banques ont adopté des pratiques uniformes, tandis que d'autres ont choisi de faire les choses à leur manière. Cette diversité crée des problèmes de performance et d'homogénéité dans le secteur. Dans le contexte actuel, la performance est cruciale, surtout dans le domaine des paiements. Il ne suffit pas que les paiements fonctionnent, ils doivent fonctionner de manière optimale pour répondre aux attentes des utilisateurs, qui sont habitués à des standards de qualité élevés. Il est donc essentiel de garantir une performance élevée, ce qui permet également de réduire la dépendance à l'égard de réseaux étrangers, renforçant ainsi la souveraineté européenne dans le secteur des paiements.
Un autre aspect de la DSP3 concerne l'authentification. Par exemple, lorsqu'un utilisateur se connecte à son compte bancaire, il doit fournir un code d'authentification. La régulation actuelle précise que cette authentification doit être renouvelée à intervalles réguliers, mais pas nécessairement toutes les heures ou tous les jours. Ce délai est laissé à l’appréciation de chaque banque, ce n’est pas clairement défini. Certaines banques avaient des politiques d'authentification très restrictives, ce qui rendait l'expérience utilisateur peu pratique, en particulier pour les utilisateurs de logiciels de gestion. La nouvelle régulation impose maintenant un délai d'authentification de 180 jours pour toutes les banques, ce qui contribue à harmoniser les pratiques.
Enfin, la DSP3 devrait également définir l'avenir des API dans le secteur de l'Open Banking. Il est essentiel que tous les acteurs, y compris les banques et les fournisseurs de services comme nous, s'entendent sur les normes et les fonctionnalités à offrir aux utilisateurs. Il y a aussi la question du modèle économique, car les banques doivent fournir des services d'API, mais la régulation actuelle ne précise pas comment elles devraient être rémunérées pour ces services. Pour l’instant, c’est gratuit. Il y a donc un débat en cours pour déterminer la juste valeur des services bancaires fournis par le biais d'API, en échange de niveaux de performance et de fonctionnalités spécifiques. C'est l'un des grands défis que la DSP3 cherche à résoudre.
Où en êtes-vous à l'heure actuelle, et quelle est la feuille de route sur les années à venir ?
Nous sommes aux alentours de 70 personnes chez Bridge. Nous sommes donc une PME très sympathique ! En ce qui concerne notre feuille de route, il y a beaucoup de choses en cours, mais je vais mettre l'accent sur deux points importants.
Tout d'abord, nous observons de fortes demandes dans le secteur du e-commerce, notamment pour les paniers d'achats élevés. Je parlais précédemment de l'automobile par exemple. Il s'agit d'un cas d'utilisation crucial pour nous. Nous travaillons à résoudre les problèmes de transactions perdues dans ce domaine, ce qui représente une grande opportunité de développement.
Deuxièmement, la plupart de nos clients historiques, qui évoluent dans les domaines de la comptabilité et de la gestion, se préparent à fournir des services de facturation électronique à leurs propres clients. Nous les accompagnons en intégrant des solutions de paiement, ce qui constitue une part importante de notre actualité, car ces projets doivent être finalisés dans un an environ.
Ces deux aspects sont donc au cœur de notre feuille de route. Comme beaucoup de FinTechs, nous avons des investisseurs, et il est important de leur montrer un chemin clair vers le succès, vers la licornisation. Mais il est essentiel de rappeler que l'objectif ultime d'une entreprise est de générer des bénéfices, pas seulement de lever des fonds et de brûler du capital.
Être une licorne, c’est un objectif ?
Non, pas vraiment. C’était une mode plus qu’autre chose. Il y a quelques années, les étudiants et les jeunes ne voulaient pas monter leur boîte ou travailler dans les startups. Il y a eu un véritable changement de mentalité, et les annonces de levées de fonds spectaculaires, des licornes, ont joué un rôle dans ce changement. Mais il ne faut pas oublier que l'objectif ultime d'une entreprise est de générer des bénéfices, et pas simplement de lever des fonds. Il est important de garder cela à l'esprit.
Pour terminer, j’aimerais dire qu’il se passe tellement de choses passionnantes dans le domaine des paiements et de l'Open Banking en ce moment. De nombreux acteurs se modernisent, que ce soit pour la facturation électronique ou le paiement dans le secteur du e-commerce, notamment face à l'augmentation des prix chez Visa et Mastercard. La DSP3 est également un sujet captivant. Je tiens à encourager tous les lecteurs ayant des besoins en matière de paiement ou d'accès aux données bancaires à venir discuter avec nous. Il existe probablement de nombreux cas d'utilisations et modèles auxquels nous n'avons pas encore pensé, et je suis convaincu que nous pouvons les aider. Si vous souhaitez en discuter avec des passionnés, n'hésitez pas à nous contacter.
Un grand merci à Olivier pour son temps ! Rendez-vous la semaine prochaine pour parler infrastructure de crédits. 🎙️🎙️