Salut tout le monde !
Le BFR, c’est LE grand sujet quand on parle de gestion financière et de cash dans une entreprise ! 💶💶
Jusque-là, l’unique solution pour financer ses besoins de trésorerie à court terme était d’aller voir son banquier. Mais depuis quelques années, des fintechs viennent également répondre à cette problématique.
Parmi celles-ci, Defacto, avec des anciens de Spendesk aux commandes. J’ai eu le plaisir d’échanger avec Morgan, co-fondatrice ! 🤩
Au programme de cette interview avec Morgan :
Comment financer son BFR en quelques clics 💶
Les ambitions de Defacto 🚀
Comment une fintech lève de la dette pour prêter 🏦
Une vision sur le contexte tech et bancaire actuel 🌩️
⏱️ Temps de lecture : 6 minutes.
Hello Morgan, peux-tu commencer par nous parler de ce que vous faites chez Defacto ?
Bien sûr ! Defacto a été créé il y a 18 mois et nous sommes 3 co-fondateurs :
Jordane, ancien co-fondateur de Spendesk, en charge du produit.
Marco, qui revient de 10 ans aux US, sur la tech et data.
Et puis moi.
Le postulat de départ est assez simple. Aujourd'hui, les PME ont beaucoup de mal à accéder à du financement à court terme, que ça soit auprès de solutions traditionnelles d’affacturage ou bancaires.
C’est assez compliqué et il y a pas mal de paperasse. Le dirigeant, ou potentiellement le DAF, a plein de choses à faire, et tout ça vient lui rajouter de la charge mentale. On s’est donc dit “Ok, nous, ce qu'on va faire, c'est du financement simple pour les PME”.
On a décidé de faire ça 100% par API et de travailler avec des solutions qui aujourd'hui servent les PME : des solutions de gestion de banque, de comptabilité ou de trésorerie, en imbriquant directement Defacto dedans.
Du coup, vous vous positionnez plutôt comme complémentaire aux banques ou concurrent ?
Je pense que nous sommes complémentaires. On a pas mal de clients qui vont aller vers les banques pour tout ce qui va être prêt à long terme, lorsqu’ils ont besoin d’investir dans de la machinerie, etc. Et tout ce qui va être créances client, court terme, BFR, c'est nous.
On pourrait penser que nous sommes concurrents sur des financements court terme comme le découvert, mais on intervient aussi sur des besoins que les banques ne servent pas.
Est-ce que tu pourrais expliquer comment ça fonctionne, du coup ? Si je suis entrepreneur et que j'ai besoin de me financer à court terme, comment ça se passe ?
Imaginons que tu es une agence de marketing et que tu es client chez Qonto. Tu as pas mal de dépenses à faire, et tu as un BFR important car tes clients te paient toujours trop tard. Il y a donc toujours ce gap à aller combler.
Tu vas sur Defacto, et on se positionne en quelques secondes grâce à tes données Qonto sur une capacité de financement total. Donc là, tu as un encours total. Tu ne payes pas de frais dessus tant que tu ne tires pas l'argent. Tu as vraiment accès à cette capacité-là, et tu viens l'utiliser quand tu as un besoin en soumettant tes factures, que ce soit tes créances clients ou tes factures d'achat. Et donc finalement, tu payes uniquement sur ce que tu utilises, et non sur ta capacité de financement total.
Et alors comment vous vous assurez que vos clients sont solvables, de leur qualité ?
Je pense qu'il y a deux manières de voir la solvabilité :
Se dire que c'est à la charge de l'emprunteur d'aller démontrer sa solvabilité en créant des applications, des dossiers, en mettant en place des BP, etc.
Ou bien c’est à la charge du prêteur qui va aller à la source pour construire ses propres applications.
C’est ce qu’on fait chez Defacto. En se connectant au compte bancaire de nos clients, on vient tirer la donnée et on recalcule de manière automatique absolument tous les indicateurs dont on a besoin pour prendre une décision.
Et si le client possède plusieurs comptes dans des banques différentes, nous pouvons les connecter à notre système grâce à l'Open Banking.
Tant que nous parlons de banque, que penses-tu des derniers évènements avec la SVB (interview réalisée le 15/3/2023) ?
Je pense à plusieurs choses.
D'abord, en ce qui concerne les banques européennes, nous sommes régulés par Bâle III, ce qui entraîne une gestion de la liquidité très différente de celle des banques américaines. SVB n'était pas soumise aux mêmes réglementations et aux mêmes contraintes.
Et puis, c'était un cas particulier où ils avaient une mauvaise gestion de la liquidité et de leurs risques. Ils avaient aussi une forte concentration de clients avec des similitudes. Tous leurs clients étaient des clients technologiques, bien financés, qui se parlaient entre eux. Il suffit que deux fonds créent la panique et il y a un bankrun. C’est beaucoup plus difficile de créer une panique similaire à la BNP.
J’ai fait pas mal d’interviews avec des CEO de fintechs, et tous m’ont parlé de financement intégré. C’est totalement ce que vous faites. Quelle est ta vision dessus ?
Historiquement, pas mal de services étaient proposés directement par les banques. Et, dans les 5 dernières années, on a vu qu’il y avait pas mal de trous. De nombreuses fintechs ont donc créé des logiciels pour la gestion de trésorerie, le paiement de factures, le contrôle des dépenses, avec pour objectif de devenir un Operating System qui centralise tous les services financiers pour leurs clients finaux.
Un des derniers services qui n’était pas adressé était le financement, pour permettre aux plateformes de proposer un financement intégré. On s’est donc positionné là-dessus.
D'ici la fin de l'année, on vise à toucher 15 000 emprunteurs. On est convaincu que notre produit et notre expérience utilisateur nous permettront de servir un maximum d'emprunteurs dans l'année à venir.
Pour revenir à toi, peux-tu nous en dire plus sur ton parcours ?
J'ai démarré ma carrière au BCG (Boston Consulting Group) dans le Private Equity. J’ai travaillé dans les bureaux africains, au Maroc, et je travaillais principalement sur le marché africain. Je suis ensuite arrivé à Paris.
Après quelques années, j'ai réalisé que je voulais explorer d'autres domaines, être plus opérationnel et avoir un impact plus direct. C'est comme ça que j'ai commencé à m'intéresser au secteur de la tech, et j'ai parlé à plusieurs start-ups, dont Jordan et Rodolphe, qui ont finalement contribué à mon premier recrutement chez Spendesk.
Et du coup, nouvelle aventure avec Defacto maintenant. Quelle est votre ambition ?
L'objectif est évidemment d'amener l'entreprise au maximum de ses capacités. Mais dans un business de lending, notre approche est différente car nous ne sommes pas axés sur la croissance à tout prix.
On a un business financier, on doit lever de la dette, ce qui signifie que notre principal objectif est d'avoir un business financièrement très sain, très rapidement, puis de croître de manière organique tout en maintenant cette solidité financière.
À l'heure actuelle, où en êtes-vous du coup ?
Depuis le 1er janvier 2022, on a prêté près de 130 millions € à 5 000 emprunteurs.
On est 15 personnes dans l’entreprise, et on a toujours eu une stratégie de recrutement très sélective et axée sur les profils seniors.
En moyenne, on a 8 ans d'expérience dans l'entreprise, avec plus de trentenaires et de quarantenaires que de personnes dans la vingtaine. C'est une approche de recrutement différente de celle que l'on peut retrouver dans les startups classiques. Nous cherchons à avoir une croissance exponentielle par rapport au nombre de personnes dans l'entreprise.
Et quels sont vos enjeux à venir sur 2023 ?
Il y a plusieurs enjeux importants pour nous :
On va significativement augmenter notre capacité de financement, donc on se muscle fortement côté dette.
On est également en train de changer notre setup réglementaire pour pérenniser notre modèle, ce qui est super important pour nous et nos partenaires.
Et puis, d'ici la fin de l'année, on vise à toucher 15 000 emprunteurs. On est convaincu que notre produit et notre expérience utilisateur nous permettront de servir un maximum d'emprunteurs dans l'année à venir.
Tu pourrais nous expliquer comment vous vous financez ?
En gros, il y a plusieurs manières de lever de la dette. Simplement, tu peux emprunter sur ton bilan. Et lorsque les montants deviennent plus importants, tu peux structurer des lignes de dettes qui ne sont pas sur ton propre bilan.
Donc au démarrage de Defacto, on a emprunté de l'argent auprès de nos BA (Business Angels), ce qui nous a permis de construire un petit fonds de 3 millions d'euros. Defacto a émis des obligations corpo et a emprunté de l’argent.
Ensuite, il faut créer un véhicule dédié, un SPV (Special Purpose Vehicle), où l'argent est cantonné. Tu travailles avec des financeurs qui te disent "Je ne veux pas que cet argent finance les opérations courantes de Defacto”. Donc l'argent doit être cantonné à un autre compte qui valide ou non les opérations de financement. Ce véhicule nous permet de nous assurer que les fonds vont vraiment à l'activité de prêt de Defacto. Car lorsque tu empruntes sur ton bilan, l'argent est fongible, il peut aller n'importe où.
Il y a un mode de financement qui se développe beaucoup, c’est le RBF (Revenue Based Financing). Peux-tu expliquer la différence avec ce que vous faites ?
Le RBF, c'est pour financer des startups. Pour combler ou accompagner le financement VC.
Nous faisons du financement court-terme pour PME de manière flexible et instantanée. On prête à des boîtes plus “traditionnelles”, comme des agences, des commerçants, du retail, des primeurs, etc. Ce sont souvent des secteurs qui ont des besoins de financement de BFR de 2/3 mois de manière récurrente.
Et quel est votre business model ?
Le business model de Defacto est très simple depuis le début : c’est un taux d'intérêt journalier. On a décidé de ne pas avoir de frais de plateforme ou d'abonnement. Il s'agit vraiment d'un coût de financement par jour. C’est un modèle “Pay As You Go”, donc nos clients paient seulement sur ce qui est effectivement utilisé. S’ils remboursent en anticipé, il y a moins de frais.
Pour terminer, l’écosystème Tech connaît des difficultés en ce moment, avec notamment pas mal de licenciements et un accès restreint au financement. Quel est ta vision là-dessus ?
J'ai lu un article récemment qui disait qu'aujourd'hui ça nous paraît difficile. Mais c'est juste revenu au stade où c'était en 2020.
Je ne sais pas si c'est la normale. Mais une boite qui lève 100 millions, c’est beaucoup d'argent, et tout a été un peu perturbé avec des boîtes qui ne généraient pas de revenus mais qui avaient 200 employés.
Donc, je me dis que, là, c’est compliqué pour tout le monde, mais ça nous permet à tous de reconstruire sur des bases saines.
Un grand merci à Morgan ! Rendez-vous la semaine prochaine pour une nouvelle interview de CEO de fintech. 👋
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