đïžđ§Ÿ Facturation & Business Model SaaS
C'est la rentrée ! Avec Lucas Bédout, fondateur & CEO d'Hyperline.
Heyyy, les interviews sont de retour !! đđ
JâespĂšre que vous avez passĂ© un bel Ă©tĂ©, je suis ravi de vous retrouver ! Le mois dâaoĂ»t a Ă©tĂ© lâoccasion pour moi de rĂ©flĂ©chir au futur de cette newsletter que jâaimerais transformer en un vĂ©ritable mĂ©dia sur les FinTechs. Jâai pas mal dâidĂ©es dont je vous parlerai trĂšs bientĂŽt.
Passons Ă notre invitĂ© de la semaine ! Pour cette Ă©dition de rentrĂ©e, jâai eu le plaisir dâĂ©changer avec Lucas BĂ©dout, le fondateur & CEO dâHyperline. Ancien Vice-President Engineering de la licorne Spendesk (rien que ça ! đ), Lucas a lancĂ© il y a maintenant un an cette startup spĂ©cialisĂ©e dans la facturation et les business models.
Au programme de notre Ă©change :
Hyperline & ses enjeux đ
Ătre solo-founder đšâđ»
Le business model SaaS đ»
Son passage chez Spendesk đŠ
Et⊠les français đ«đ·
â±ïž Temps de lecture : 6 minutes
Hello Lucas, pourrais-tu commencer par te prĂ©senter ?Â
Salut Thomas, bien sĂ»r ! Moi, je m'appelle Lucas, je suis français et je travaille dans le domaine de la tech depuis environ 10 ans. Aujourd'hui, j'ai 29 ans et je n'ai pas fait d'universitĂ© ni d'Ă©cole, car jâai commencĂ© directement en tant que dĂ©veloppeur. J'ai travaillĂ© en tant que dĂ©veloppeur dans plusieurs entreprises, dont Lunettes Pour Tous en tant que CTO. J'ai Ă©galement travaillĂ© en Angleterre, puis Spendesk en passant de 5 Ă 500 personnes oĂč jâĂ©tais VP engineering.Â
Il y a environ un an, j'ai fondĂ© Hyperline. Initialement, j'ai lancĂ© l'entreprise depuis les Alpes, mais maintenant je suis Ă Paris, oĂč je vis. J'ai fondĂ© Hyperline seul, et nous sommes huit personnes Ă lâheure actuelle.
Beaucoup d'entreprises, au dĂ©part, font l'erreur de crĂ©er un produit, de le lancer avec un prix, et puis six mois plus tard, deux ans plus tard, elles ont toujours le mĂȘme prix. [âŠ] Si au bout de deux ans et demi, la valeur perçue par tes clients pour ton produit est la mĂȘme qu'au bout de six mois, c'est un gros problĂšme.
Câest assez rare de voir un seul fondateur ! Quels sont les avantages et inconvĂ©nients pour toi ? Â
Je trouve que les gens qui se lancent dans la crĂ©ation dâune boĂźte avec des cofondateurs qu'ils ne connaissent que depuis trois ou quatre semaines sont un peu fous. C'est un engagement Ă©norme, comparable Ă un mariage. En rĂ©alitĂ©, tu passes plus de temps avec tes cofondateurs qu'avec ton conjoint.Â
Pour ma part, j'avais quelques personnes avec qui j'avais dĂ©jĂ travaillĂ© sur des projets cĂŽtĂ© business et que je trouvais intĂ©ressantes. J'aurais pu envisager de monter une startup avec elles, mais elles n'Ă©taient pas disponibles Ă ce moment-lĂ . Donc, pour moi, la dĂ©cision de fonder Hyperlink en tant que fondateur unique a Ă©tĂ© assez Ă©vidente.Â
Ăa a un avantage Ă©norme au dĂ©but, car les prises de dĂ©cisions liĂ©es Ă la marque, Ă la culture d'entreprise, au recrutement et mĂȘme Ă la levĂ©e de fonds peuvent ĂȘtre prises rapidement. Par exemple, nous avons levĂ© des fonds avec Index Ventures. Si j'avais eu un cofondateur, nous aurions peut-ĂȘtre dĂ» discuter pendant des mois avec diffĂ©rents investisseurs.Â
AprĂšs, câest vrai que se sentir seul ce n'est pas toujours Ă©vident. Mais maintenant nous avons une super Ă©quipe et tout le monde est trĂšs impliquĂ©.Â
Du coup, Hyperline. Peux-tu expliquer ce que vous faites ?
Chez Hyperline, on propose un outil de facturation. Pour faire simple, on se glisse entre le CRM et le logiciel de comptabilitĂ©. On s'occupe de la gestion des abonnements et de tout le mĂ©canisme d'abonnement. Par exemple, tel client est abonnĂ© pour six mois, lui pour trois ans, et puis il y en a un qui paie tous les mois, un autre toutes les deux semaines⊠On gĂšre toute la partie facturation, et mĂȘme la partie paiement.Â
Attention, nous ne sommes pas un processeur de paiement Ă proprement parler, on s'intĂšgre Ă Stripe et d'autres outils. Mais on se charge de tout le processus de facturation. On est Ă©galement capables de gĂ©rer de la facturation dynamique. Ăa veut dire qu'on peut s'adapter aux entreprises qui ont des modes de facturation basĂ©s sur l'utilisation ou la consommation de ressources. Avec trĂšs peu de configurations et sans toucher Ă du code, on peut te permettre de facturer des choses complexes.
Vous ĂȘtes spĂ©cialisĂ© dans les business models SaaS, c'est ça ?Â
Aujourdâhui, on fait dâautres choses. Mais l'essence mĂȘme d'Hyperline, c'est effectivement les business models SaaS. C'est lĂ oĂč se situe le vrai challenge. Facturer tes paires de baskets sur le site de Nike, ce n'est pas forcĂ©ment le casse-tĂȘte. C'est un paiement Stripe et il nây a mĂȘme pas besoin de factures en gĂ©nĂ©ral. Mais dans le monde du B2B, pour gĂ©nĂ©rer des factures, il faut connecter ton CRM, ton logiciel comptable, il faut sortir des factures dans la langue du client, dans ta langue aussi. Pas simple ! Quand les gens font leur premiĂšre facturation, leur premier cycle, ils sont un peu perdus. C'est lĂ qu'on intervient. VoilĂ pourquoi on est focalisĂ©s sur les SaaS aujourd'hui, parce que c'est lĂ que le problĂšme est le plus important.
AprÚs, à terme, je pense qu'on s'étendra à d'autres domaines. J'ai discuté avec pas mal de boßtes qui font du lending, du retail. Elles ont aussi des soucis, mais bon, on ne peut pas tout aborder d'un coup.
Peux-tu nous expliquer comment ça fonctionne Hyperline ? Les fonctionnalitĂ©s ?Â
Prenons un exemple ! Tu veux crĂ©er un abonnement pour un client qui paie 150⏠par mois pour accĂ©der Ă ta plateforme. Tu peux faire ça directement dans notre interface en quelques clics. Pas besoin de t'encombrer Ă crĂ©er le client dans ta base de donnĂ©es, lui attribuer un abonnement avec un paiement mensuel de 150âŹ, etc. Et puis prenons un autre client qui a nĂ©gociĂ© un rabais de 20⏠et qui ne paiera donc que 130âŹ. Notre plateforme te permet de gĂ©rer tout ça en quelques clics, de maniĂšre super simple.Â
Une fois que c'est fait, on gĂšre tout le back-end, toute la partie administrative. Si ton client veut la facture traduite, pas de soucis. Sâil a besoin de mentionner un numĂ©ro de bon de commande, c'est pris en charge. Tous ces petits problĂšmes, qui prennent du temps et de la charge mentale, c'est notre affaire. On gĂšre aussi toute la logique d'abonnement. Par exemple, si un client veut arrĂȘter en cours de mois, on fait le prorata. Sâil veut changer de plan ou rĂ©silier dans un an, on le gĂšre pour toi.Â
Vous avez une cible prĂ©cise ?Â
On a deux cibles principales.Â
La premiĂšre, ce sont les entreprises qui commencent et qui cherchent leur premier outil de facturation. Ton premier client qui arrive, il faut que tu lui envoies une facture. Et mĂȘme si tu sais comment utiliser Stripe, tu nâas peut-ĂȘtre aucune idĂ©e de comment fonctionnent certaines fonctionnalitĂ©s. Alors tu viens sur Hyperline, tu t'inscris en quelques minutes, et c'est fait. Tu es dans les clous lĂ©galement, tu nâas pas d'intĂ©gration PSP Ă faire, et ton client a une bonne expĂ©rience. C'est notre premiĂšre cible, et on essaie de la dĂ©velopper autant que possible.Â
Et puis, il y a une deuxiĂšme cible, qu'on ne pensait pas pouvoir toucher tout de suite, ce sont les grosses boĂźtes tech, avec des plus gros revenus et qui ont des processus plus longs.Â
On avance sur les deux fronts en mĂȘme temps. Si on doit en privilĂ©gier une, on le fera. Mais pour l'instant, on est sur les deux.
Tu aurais des conseils pour un entrepreneur SaaS qui souhaite optimiser son business model ?Â
Chez nous, le pricing, c'est un peu notre deuxiĂšme expertise. Pricing et billing sont Ă©troitement liĂ©s. Dâailleurs, on a lancĂ© un projet appelĂ© le SaaS Pricing Explorer. Â
De nos jours, beaucoup d'entreprises, au dĂ©part, font l'erreur de crĂ©er un produit, de le lancer avec un prix, et puis six mois plus tard, deux ans plus tard, elles ont toujours le mĂȘme prix. Mais en rĂ©alitĂ©, entre-temps, il y a eu cinq fois plus de boulot effectuĂ©, ce qui n'a aucun sens. Si au bout de deux ans et demi, la valeur perçue par tes clients pour ton produit est la mĂȘme qu'au bout de six mois, c'est un gros problĂšme. La vĂ©ritĂ©, c'est que tu ne veux pas toucher Ă ton prix parce que ça implique de changer toute ta structure financiĂšre pour gĂ©rer les nouvelles modifications que tu vas apporter. C'est chronophage, et du coup, les entreprises repoussent ça Ă plus tard.Â
Il y a diffĂ©rents modĂšles qui fonctionnent, et ça dĂ©pend de pas mal de choses dans ton business. Ă qui tu vends, Ă quoi ressemble ton produit, la perception de la qualitĂ© du produit, le profil de tes clients. Par contre, une chose que toutes les entreprises devraient faire, c'est de ne jamais avoir tout le monde au mĂȘme tarif. Chez nous, par exemple, aucun de nos clients n'a le mĂȘme prix. Certains ont des tarifs diffĂ©rents, car on teste diffĂ©rentes approches pour voir ce qui fonctionne le mieux. Je pense que toutes les entreprises devraient faire ça. Au dĂ©but, tu construis ton produit, tu le testes, tu essaies plein de choses, tu trouves ton product-market fit, et petit Ă petit, tu finiras par trouver quelque chose de stable. Ensuite, tu pourras continuer Ă expĂ©rimenter avec de petits groupes de clients.
Tu Ă©tais VP engineering chez Spendesk, qui est maintenant une licorne. Que ce soit chez Spendesk ou dâautres grosses startups, on voit beaucoup dâancien salariĂ©s de ces entreprises qui montent leur boĂźte par la suite. Ăa tâa apportĂ© quoi ?
Le fondateur, Rodolphe, ce n'est pas quelquâun qui dĂ©cide de tout. Il pose des questions, te fait rĂ©flĂ©chir, t'accompagne, a une vision, mais il ne dĂ©cide pas de tout. Il ne dit pas "aujourd'hui, on fait ça" et n'impose pas des dĂ©tails prĂ©cis comme revoir le design d'un bouton. En fait, il a recrutĂ© des personnes ayant un Ă©tat d'esprit de "je veux gĂ©rer mon truc". Je pense que c'est ce qui a beaucoup contribuĂ© Ă cette mentalitĂ© chez Spendesk. Il y a un cĂŽtĂ© trĂšs horizontal. Tu avais tes responsabilitĂ©s, et c'Ă©tait naturel pour nous de prendre en charge nos missions.Â
C'Ă©tait un peu la suite logique, et c'Ă©tait aussi liĂ© Ă notre amitiĂ©. On avait des centres d'intĂ©rĂȘt similaires et ces personnes lançaient des boĂźtes pendant que je faisais mon job de VP Engineering. Au final, tu as envie de les suivre, tu vois. Leurs projets semblaient trop cool.Â
C'est un mélange de ces deux composantes : les profils recrutés sont un peu des entrepreneurs dans l'ùme, et les fondateurs permettent cette expression. Il y avait également un état d'esprit contestataire. Et, quelque part, c'est une mentalité d'entrepreneur. Ce genre de personnes, les rùleurs, finissent souvent par entreprendre.
Tu penses quoi de lâĂ©cosystĂšme FinTech en France ? Tu sens un certain engouement autour des FinTechs en France ?
J'ai beaucoup discutĂ© avec des entrepreneurs Ă Berlin, et j'ai passĂ© beaucoup de temps Ă Londres. J'y ai mĂȘme vĂ©cu pendant un an. J'y vais souvent maintenant parce qu'Index Ventures y est basĂ©, et nous avons des clients lĂ -bas. Mais je pense que cela ne concerne pas uniquement la FinTech ou la Tech, c'est plus liĂ© aux Français.Â
Les Français ont tendance Ă ĂȘtre communautaires, comparĂ©s aux Anglais. En Angleterre par exemple, il y a un cĂŽtĂ© trĂšs "on boit des biĂšres de cinq Ă six avec les collĂšgues, et Ă six heures, on va voir nos amis". Les Français ont cette habitude de tout mĂ©langer et de rester entre eux. Ils aiment ĂȘtre Français. Il nây a quâen France oĂč tu entends quelqu'un dire "je veux tester votre produit parce que je supporte la France". Je pense que c'est vraiment liĂ© Ă la culture de base en France, Ă cette fiertĂ© qu'on ressent de ne pas vouloir que les AmĂ©ricains ou les Anglais nous donnent des leçons. On a envie de crĂ©er de grands succĂšs français.Â
Et puis, Paris est une grande ville mais reste petite par rapport Ă Londres. Il y a moins de monde, les gens se connaissent. Parmi les fondateurs de ma gĂ©nĂ©ration, j'en connais beaucoup, car nous assistons aux mĂȘmes Ă©vĂ©nements. Donc je pense que c'est liĂ© Ă la France, Ă cette affinitĂ©. C'est un aspect culturel. En Angleterre, tu discutes avec des entrepreneurs anglais, et ils ne se connaissent gĂ©nĂ©ralement pas les uns les autres.
DerniĂšre question, quels sont vos enjeux Ă venir ?Â
On en a plusieurs.Â
Dâabord, un socle produit que nous devons continuer Ă dĂ©velopper. Il y a une base de fonctionnalitĂ©s communes que les gens attendent, des choses basiques comme des Ă©lĂ©ments comptables, des exports, des intĂ©grations. Il faut terminer cela dans notre feuille de route produit.
Ensuite, il y a l'expansion europĂ©enne. Nous sommes dĂ©jĂ plutĂŽt bien implantĂ©s en France, et nous avons Ă©galement des clients partout en Europe. Mon souhait est de nous concentrer davantage sur l'Angleterre, l'Allemagne et les pays nordiques. Nous voulons vraiment avoir une forte prĂ©sence ici. Ensuite, le reste concerne peut-ĂȘtre dâaller aux Ătats-Unis, frapper Ă la porte un peu lĂ -bas, et en fonction de tout cela, nous verrons si nous levons Ă nouveau des fonds ou non. Mais pour l'instant, nous n'en avons pas besoin.
Un grand merci Ă Lucas, et rendez-vous la semaine prochaine pour une nouvelle interview ! đïžđïž